Kenzaburô Ôé, auteur japonais et détenteur du Prix Nobel de 1994 livre une nouvelle classique et poignante, « Gibier d'élevage ». En pleine guerre, un avion américain s'écrase dans la profondeur des montagnes japonaises. Le rescapé est fait prisonnier par les habitants du village. Le prisonnier interroge les habitants, pour la simple et bonne raison qu'il est noir. Cet homme va provoquer la discorde chez les habitants et finalement c'est sa couleur de peau qui va le distinguer des autres. Il va alors être traité comme une bête, stocké dans un trou et nourri à la gamelle. Le noir devient un animal, et les habitants l'apprivoisent, comme une bête docile. L'histoire est racontée à travers les yeux d'un enfant du village, qui va passer par un grand nombre d'émotions pendant le récit. Peur, admiration, excitation, calme, joie de posséder une bête comme celle-ci, parfois même une certaine sensualité, des formes imperceptibles d'érotisme. C'est une lecture dérangeante, mais nécessaire, qui pose la question
du regard sur l'autre, qui témoigne de la bêtise humaine et qui montre à quel point celle-ci peut mener loin à cause de l'ignorance et de la peur de l'inconnu. Récit tristement actuel, il est néanmoins nécessaire afin de comprendre les réactions des gens peu éduqués et de se mettre à niveau sur ces questions de vivre ensemble.